BD fait de société

Mal de mère

MAL DE MÈRE, par Rodéric Valambois (Soleil, 2015, coll. Quadrants)

mal de mèreRodéric vit dans une famille « classique », avec son père, sa mère, son frère et sa sœur. Tout se passe bien, enfin, le croit-il. Il ne se rend pas compte que sa mère, institutrice, a un gros problème, qu’elle cache des bouteilles de porto un peu partout et le jeune garçon ne réalise pas que la liste de courses qu’elle lui confie contient systématiquement de l’alcool… Il est le seul de la famille à ne pas s’en rendre compte au départ… mais lorsque tout le monde est au courant, la famille va tâcher d’aider la mère de famille, mais celle-ci replonge à chaque fois. Rodéric vit alors la fin de son enfance et son adolescence avec cette situation compliquée, et il en veut à sa mère… Il n’attend qu’une seule chose, partir…

Voici un album emprunté au hasard à la bibliothèque, sans vraiment lire la 4e de couverture. Je l’ai choisi car je ne connaissais pas l’auteur, et j’étais curieuse de ce jeu de mot que constitue le titre de l’album. Je ne m’attendais pas à un tel sujet difficile, l’alcoolisme, maladie qui pourrit, au-delà de la personne concernée, la vie de la famille toute entière et la détruit à petit feu. En tant que lecteur, on est placé à hauteur d’enfant, avec Rodéric qui découvre progressivement pourquoi l’ambiance familiale se dégrade, pourquoi il entend de plus en plus souvent ses parents se disputer. Au départ, il croit que c’est à cause de lui, il culpabilise pour des broutilles, et lorsque c’est la petite sœur qui annonce au narrateur l’alcoolisme de leur mère, on est assez étonnés qu’il n’ait rien vu avant, mais on le comprend aussi, car c’est quelque chose qu’il ne soupçonnait pas : sa mère avait un travail, des vies professionnelle et familiale remplies. Peut-être ne voulait-il pas voir ce qui lui semblait inimaginable…

Les réactions du narrateur sont ambivalentes : il est parfois compréhensif, parfois en rejet de sa mère, mais c’est plus souvent la seconde option qui se produit. Il ne cherche pas à savoir l’origine de cette addiction, et au fil du temps et de la maladie qui persiste, il s’éloigne dès qu’il le peut. J’ai aimé dans cette autobiographie le fait que le narrateur ne cache rien de ce qu’il a pu vivre, qu’il trace un portrait réaliste, même si bien peu flatteur, de sa famille, de sa mère en particulier. Il décrit bien cette maladie qui impacte toute la famille, et les solutions de chacun pour oublier la situation familiale compliquée, entre la fuite, « l’autruche » ou encore le déni.

Côté graphique, le trait est assez dépouillé, les personnages ont des têtes assez allongées, le trait de Rodéric Valambois serait plutôt du genre humoristique et/ou enfantin, mais le récit ne l’est pas du tout. Le propos, grave, est contrebalancé par le trait à l’apparence légère du narrateur. L’absence de couleurs donne un ton particulier à l’ensemble, mais cela sied bien à cette histoire qui peut avoir des résonances chez bon nombre d’entre nous. J’ai aimé ce trait parfois doux et qui allège le propos, qui fait du bien au milieu de cette situation familiale plus que compliquée, et cela m’a permis de lire l’album d’une seule traite ou presque.

En conclusion, cet album au sujet fort, très bien raconté et sans temps mort, a constitué pour moi une lecture choc ; je pense m’en souvenir pendant un bon bout de temps !

Non mentionné sur l@BD, je dirais à partir de 15 ans.

On en parle sur les blogs : Mes échappées livresques, La fabrique à bulles, Les fanas de livres, Un coin de blog, Blog Brother

Quelques planches à voir sur le site de l’éditeur.

Cet album participe à labd bleu, et ce mercredi c’est Noukette qui nous convie dans sa bibliothèque remise à neuf où elle regroupe les liens de tous les bulleurs de la semaine !

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