BD engagée, BD historique

Le manifeste des 343

LE MANIFESTE DES 343. Histoire d’un combat, par Adeline Laffitte et Hélène Strag (scénario) et Hervé Duphot (dessin) (Marabout, 2020)

manifeste A la fin de l’été 1970, Nicole travaille au service documentation de l’hebdomadaire Le nouvel Observateur. Elle entend parler d’un groupe de femmes qui a porté une gerbe à la femme du soldat inconnu et mis en avant leurs revendications d’un avortement libre… Dans sa vie quotidienne, elle côtoie une jeune fille qui garde ses deux enfants, ainsi que la femme de ménage du bureau, sans se douter que toutes deux vont affronter une grossesse non-désirée… Nicole est touchée par ces situations et décide de mener l’enquête auprès de médecins qui réalisent des avortements de manière clandestine, elle assiste aux états généraux de la femme et aux manifestations du MLF contre le projet de loi pour un avortement uniquement thérapeutique… Jusqu’au jour où elle a l’idée pour le magazine de mettre en avant le combat de ces femmes, avec des femmes qui avoueraient publiquement avoir avorté… Mais ce n’est pas facile de réunir des témoignages publics, et le risque est grand pour celles qui osent dire publiquement ce qui est fait dans le silence le plus total…

Cet album fait écho à la couverture du dernier numéro du magazine Causette, mais je l’avais choisi en bibliothèque un peu avant… L’album se lit de manière aisée, naviguant entre la documentaliste/journaliste du Nouvel Observateur et le MLF. On replonge dans les années 1970, lors desquelles l’avortement était illégal et où les femmes devaient risquer leur vie pour pouvoir choisir ce qu’allait devenir leur corps… Cela paraît assez fou, 50 ans après, de voir une telle situation, avec des avorteuses (ou « faiseuses d’ange ») qui utilisaient du matériel inapproprié pour avorter des femmes qui étaient tombées enceinte à un mauvais moment… Ce qui m’a le plus fait mal dans cette lecture est lorsqu’il est expliqué que certaines avorteuses faisaient délibérément mal à la femme pour lui « faire passer l’envie de recommencer »… Ce non-respect du corps m’a hérissé. Bref, ce récit n’est pas toujours simple à lire mais il est essentiel pour témoigner de l’importance de pouvoir disposer de son corps. On suit aussi une femme qui mène l’enquête, qui s’implique dans un projet qui ne la concerne pas directement au départ. Je connaissais un peu l’histoire du manifeste des 343, mais je ne savais pas que Simone de Beauvoir avait demandé à ce qu’il paraisse dans le Monde avant que finalement le nouvel Observateur le prenne (alors que le MLF ne le souhaitait pas non plus). On sent ce jeu de pressions qui s’exerce pour éviter de choquer le lectorat tout en cherchant le scoop annonciateur de ventes en hausse, et on suit aussi les actualités à travers les écrans de télévision de Télé-Midi… Le tout est bien raconté, c’est fluide et sans temps mort. Pour moi cet album est à mettre dans toutes les mains à partir du lycée…

Graphiquement, j’ai retrouvé le trait doux et lisible de Hervé Duphot, dessinateur de l’album sur Simone Veil qui était scénarisé par Pascal Bresson. L’aspect bichromie (tons orangés/rosés) adoucit les propos parfois très durs, et c’est très bien comme cela. Les presque 140 pages se lisent bien, et je suis contente d’avoir emprunté un peu au hasard cet album (comme souvent d’ailleurs !).

Non mentionné sur l@BD, je dirais à partir de 14/15 ans.

On en parle sur les blogs : Blog-o-noisettes, Hypathie, Comme dans un livre, Jean-Louis Le Breton

Premières planches à voir sur Izneo.

Cet album est présenté aujourd’hui dans le cadre de bd, aujourd’hui chez Moka au milieu de (ses) livres

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18 réflexions au sujet de “Le manifeste des 343”

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