LES EXPORTÉS, par Sonia Devillers (Flammarion, 2022)
Essai sur l’histoire de la famille maternelle de l’autrice, raconté de son point de vue de la petite fille, née en France de mère roumaine, avec ses souvenirs familiaux et ses recherches dans les archives roumaines déclassifiées. Elle y apprend que sa famille, bourgeoise à Bucarest, a été considérée comme ennemie du régime communiste car d’origine juive, et a été échangée contre des bestiaux par le gouvernement roumains… Les cinq membres de sa famille n’ont pas été les seuls à avoir fait partie de ce trafic d’êtres humains lors des années 1950 et 1960…
Voici un récit emprunté à la bibliothèque, après l’avoir repéré à la radio (l’autrice est journaliste à France inter, et a donc fait le tour des émissions pour parler de son livre…). J’ai eu un peu de mal à accrocher au départ, certains passages étant particulièrement durs, sur les massacres de juifs pendant la seconde guerre mondiale, sur les échanges contre des bestiaux ou des machines-outils. Il y est aussi question de communisme, de politique générale (Ceaucescu est mentionné, tout comme le régime précédent qui a collaboré avec les nazis), de services secrets (la securitate et ses agents infiltrés partout), de l’origine de ses grands parents (Gabriela grand-mère de l’autrice d’origine juive et issue d’un milieu aisé, une famille d’intellectuels et de scientifiques roumains baignant dans un milieu culturel favorisé, et Harry le grand-père né aux Etats-Unis puis revenu au pays), ainsi que du changement de nom, roumanisé pour se fondre dans le pays des origines. Au début du texte, il y a pas mal de noms roumains, c’est vraiment l’inconnu pour moi qui ne connaît rien de ce pays d’Europe de l’est. La grande histoire se mêle à la petite, et l’autrice revient sur le début du 20e siècle et les changements liés à la guerre en Europe de l’est., avec un certain nombre de noms roumains totalement nouveaux pour moi… J’ai mis un peu de temps à accrocher au récit, mais au final, j’ai apprécié découvrir cette partie de l’histoire totalement oubliée… L’autrice, journaliste, retrace comment elle a remonté le fil de son histoire familiale, et même si cela a été compliqué par moment pour elle (ce qu’on peut tout à fait comprendre), elle parvient à montrer comment le gouvernement roumain a commis quelque chose que même les nazis n’avaient pas « réussi » à faire… J’ai été scotchée par certains passages…
Egalement, ce qui a été étonnant pour moi lors de cette lecture, c’est que parfois j’ai eu l’impression d’entendre la voix de l’autrice (que j’entends parfois à la radio le matin), car le style est le même que lorsqu’elle parle, c’est-à-dire clair et précis.
Bref, cela a donné 260 pages qui se lisent parfois avec difficulté car le thème est dur (on est bien loin d’une lecture légère), mais 260 pages assez édifiantes sur une pratique qui a eu lieu au siècle dernier, et qui faisait des différences entre les habitants d’un même pays, alors que la Déclaration universelle des droits de l’homme avait été adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948… Ce témoignage/enquête fait froid dans le dos, mais est essentiel pour éviter qu’un tel phénomène se reproduise un jour à nouveau.
Pour les adultes.
On en parle (beaucoup) sur les blogs : Sonia boulimique des livres, Mots pour mots, Lili au fil des pages, Main tenant…