BD fait de société, BD hors de nos frontières

Un ennemi du peuple

UN ENNEMI DU PEUPLE, par Javi Rey (Dupuis, Aire libre, 2022), d’après la pièce de Henrik Ibsen

ennemi peupleThomas est docteur et avec sa famille, il est installés sur une île. Son frère Peter est quant à lui le maire du village de cette île. A eux deux, ils ont monté une station thermale qui connaît un succès grandissant. La prospérité de l’île est assurée, jusqu’à ce que Thomas découvre que les eaux utilisés pour le thermalisme contiennent des bactéries qui engendrent des maladies chez les touristes… Mais dévoiler ce scandale signifierait la fin de la prospérité de l’île, et un risque économique trop grand à supporter pour les habitants et tous ceux qui dépendent de ce business… Le maire, de son côté, ne veut pas entendre parler de ce problème et arrose généreusement ses soutiens, tandis qu’il tente de museler ses opposants… Que doit faire Thomas ? Faire éclater le scandale et rompre définitivement avec son frère, ou fermer les yeux ?

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BD fantastique

Ceux qui restent

CEUX QUI RESTENT, par Josep Busquet (scénario) et Alex Xoul (dessin) (Delcourt, 2018)

ceux quiDans une maison, un soir, un enfant qui dormait est réveillé par une étrange créature qui entre dans sa chambre et lui demande de l’accompagner pour sauver ses amis… L’enfant disparaît et une enquête de police commence : disparition ? kidnapping ? meurtre ? Pourquoi aucune trace n’est-elle trouvée dans la chambre ? C’est ce qui arrive à Ben, un fils unique qui disparaît sans laisser de trace. Ses parents sont un temps soupçonnés d’être à l’origine de la disparition du fils, qui passionne les journaux. Mais quelques mois après, le jeune garçon revient comme par magie… comme si de rien n’était… Que s’est-il passé ?

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BD aventure, BD jeunesse

Waluk, tome 1

WALUK, tome 1 : LA GRANDE TRAVERSÉE, par Emilio Ruiz et Ana Miralles (Dargaud, 2020)

walukWaluk est un ourson polaire qui est abandonné par sa mère. Lui pense qu’elle reviendra mais doit bien survivre en attendant. Peu doué pour trouver de quoi se nourrir, il est sauvé d’une mort certaine par un vieil ours bougon nommé Esquimo, qui va lui donner les astuces pour apprendre à vivre sans sa mère, mais aussi pour se méfier des hommes qui viennent sur leur territoire, ainsi que des chiens que les hommes ont apprivoisés…

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BD historique, BD hors de nos frontières, BD sentimentale

Gentlemind, épisode 1

GENTLEMIND, Episode 1, par Juan Diza Canales et Teresa Valero (scénario) et Antonio Lapone (dessin) (Dargaud, 2020)

gentlemindAmérique, 1939. A New-York, dans la ville qui ne dort jamais, vivent Navit et Arch. Dans ce couple, il est illustrateur de presse, elle est son modèle. C’est l’époque des magazines de pin-up, mais Arch ne trouve pas de travail. Armé de son dessin de Navit, il écume les rédactions new-yorkaises, mais n’essuie que des refus. Dans les bureaux du magazine Gentlemind, il réitère sa demande, mais ce qu’on lui propose, c’est de rencontrer son modèle plutôt que de l’embaucher. Navit va négocier pour que son compagnon travaille dans le magazine, mais c’est plus un placard qu’autre chose. Déçu, Arch fait semblant, mais décide un beau jour de s’engager dans la guerre qui fait rage en Europe… Les mois passent, Navit quant à elle est toujours modèle pour Gentlemind, et son patron, M. Powell, tombe amoureux d’elle et l’épouse, avant de mourir d’une crise cardiaque quelques jours/semaines plus tard. S’en suit une bataille judiciaire entre la première épouse et la veuve, et un accord à l’amiable savamment négocié par son avocat va permettre à Navit de toucher plusieurs millions de dollars et de prendre la tête du magazine qui périclite… Elle va alors décider de changer la ligne éditoriale de la revue, en questionnant les lecteurs sur leurs souhaits… Lire la suite « Gentlemind, épisode 1 »

BD historique, BD sentimentale

Le tour de valse

LE TOUR DE VALSE, par Denis Lapière (scénario) et Ruben Pellejero (dessin) (Dupuis, 2013, coll. Aire libre)

Vitor est un ancien soldat de l’armée rouge, qui a combattu pendant plusieurs années. Revenu dans sa famille, il retrouve sa femme Kalia et ses deux enfants, Youlia et Sérioja. Le couple vit heureux malgré l’appartement trop petit et les privations, jusqu’à ce que Vitor soit dénoncé par un camarade, sur la base de fausses allégations. Condamné à dix années de travaux forcés dans un camp en Sibérie pour être « rééduqué par le travail », il va connaître mauvais traitements et rudes conditions de vie en tant que « zek ». C’est là-bas aussi qu’a lieu chaque mois le « tour de valse », un éphémère moment de rencontre avec d’autres prisonniers. A l’occasion de la mort de Staline, au printemps 1953, beaucoup de zeks sont libérés des goulags. Voyant que son mari ne revient pas, Kalia décide alors de se rendre en Sibérie pour le retrouver. Elle va se retrouver confrontée au mutisme de certains anciens prisonniers. Seuls quelques uns voudront bien l’aider et lui révéler ce qu’ils ont pu vivre. Ainsi elle pourra reconstituer le puzzle du parcours de son mari, mais ce qu’elle va découvrir va dépasser tout ce qu’elle avait pu imaginer…

Le tour de valse est un album édité pour la première fois en 2004, et réédité à l’occasion de l’anniversaire de la collection « Aire libre ». Je l’ai emprunté un peu au hasard, sans rien savoir de l’histoire ou du dessin. Et encore une fois c’est une bonne pioche, car le scénario est très fort, montrant des aspects peu abordés en BD : le déchirement d’une famille dans l’URSS de Staline et la vie au goulag. Même si au départ, j’ai été freinée par le dessin, avec ses traits que je trouvais trop marqués, j’ai oublié ce désagrément au fil de l’histoire et ai été happée par le récit de l’héroïne courageuse et amoureuse qui recherche son mari plus que tout, qui laisse même ses enfants pour partir au fin fond de la Sibérie, où une omerta règne : tout le monde se tait sur ce qui a été vécu dans les camps de travail. Les découvertes s’enchaînent avec les rencontres d’anciens zeks libérés, l’héroïne découvre la situation de son mari pendant ses travaux forcés et le « tour de valse ». Tout cela ne la freine pas, bien au contraire, mais lui donne encore plus d’espoir pour retrouver son amour. Il y a donc ce côté sentimental qui constitue une part de l’album, et j’ai été aussi sensible au côté historique, qui est révélé à travers la ‘petite’ histoire, celle de cette famille séparée à cause d’une dénonciation. Le régime totalitaire et inhumain de Staline est dénoncé sous ses pires travers avec l’exemple de Vitor. Bref, un scénario très bien mené et documenté, avec un dessin et des couleurs qui le servent bien, cela donne un album très intéressant que Dupuis a bien fait de rééditer !

A partir de 15 ans selon l@BD.

On en parle sur les blogs : Mille et une frasques, Sur le fil avec 2 N, Blog BD Sud Ouest, La barbe

Cette histoire est à l’origine d’un BD concert.

Aller voir le blog du scénariste et celui du dessinateur (en espagnol).

BD polar

La Mondaine, tome 2

LA MONDAINE, tome 2 par Zidrou (scénariste) et Jordi Lafebre (dessin et couleurs) (Dargaud, 2014)

Suite du tome 1. 1942. Voilà cinq ans qu’Aimé Louzeau travaille à la brigade parisienne des mœurs. Professionnellement, il participe à la collaboration avec l’occupant, comme toute la police parisienne et mène son enquête pour retrouver Eeva la tahitienne arrêtée en 1937 lors d’un effeuillage… Personnellement, sa situation est compliquée : il entretient des relations avec Valentine, une prostituée qui ne veut pas s’engager avec lui, et par dépit, demande à sa concierge transie d’amour pour lui de l’épouser. Mais ses plans vont totalement changer lorsqu’il va retrouver la trace d’Eeva… Ses relations avec les femmes sont bien compliquées…

Voilà la fin du diptyque écrit et dessiné par les mêmes auteurs que Lydie. Je ne sais quoi penser de cet album, que j’ai trouvé plus décousu et aussi plus noir que le premier. Peut-être aurais-je dû relire le volume 1 pour me faire une idée plus globale de l’histoire. De nombreux propos sont abordés dans ce second volume : la relation entre Aimé et Valentine la prostituée, la situation difficile de la mère d’Aimé qui héberge son mari atteint de démence, la recherche d’Eeva, la collaboration de la police française avec l’occupant nazi avec la rafle du Vél d’Hiv, la pression antisémite de plus en plus forte… Beaucoup de thématiques, qui parfois se croisent, mais au final je sors de cette lecture un peu dubitative : qu’a-t-on voulu faire passer comme message ? J’ai une impression confuse sur cet album, à cause du trop grand nombre de thèmes. Cependant, j’ai été touchée par plusieurs d’entre eux : la rafle du Vel d’Hiv et Valentine qui retrouve un Aimé rancunier qui ne va pas bouger le petit doigt pour l’aider à sortir avec sa fille de cet enfer, la relation entre la mère et le père d’Aimé se terminant tragiquement… Mais je n’ai pas bien compris ce que venaient faire dans l’histoire le docteur Gheldman et sa famille, un exemple supplémentaire de personnes raflées au Vel d’Hiv…  Enfin, la fin de l’album m’a encore déconcertée, avec un épilogue qui laisse à penser que les personnages ont existé… J’adore cependant toujours autant les dessins, qui nous transportent dans une autre époque et une autre ambiance, et sont si réalistes et expressifs au niveau des portraits. Au final, je suis circonspecte quant à cet album, au dessin et aux couleurs certes magnifiques, mais au scénario un peu trop décousu pour moi…

A partir de 15 ans selon l@BD.

On en parle sur les blogs : La bibliothèque de Noukette, Un amour de BDBulles et onomatopées, Les sentiers de l’imaginaire, D’une berge à l’autreBouquinovore

Premières planches à lire sur Izneo.

Aller voir du côté du blog de Jordi Lafebre.

BD polar

La mondaine, tome 1

LA MONDAINE, tome 1, par Zidrou (scénario) et Jordi Lafebre (dessin) (Dargaud, 2014)

1944, à Paris, Aimé Louzeau est inspecteur à « la Mondaine », la brigade des mœurs, et est coincé dans un refuge pendant un bombardement allié, juste après avoir arrêté une prostituée. Retour en 1937, alors qu’Aimé vient d’être nommé dans ce service si particulier de la police de Paris, localisé au 36 quai des Orfèvres. Célibataire vivant chez sa mère avec une servante, il va découvrir des méthodes peu orthodoxes d’interrogatoire et des histoires plus glauques les unes des autres. Agneau innocent, il va plonger dans un monde jusque là inconnu pour lui, entre maquereaux et prostituées, virées à vélo avec le chef du service… Sa vie n’était déjà pas simple au départ : son père était un prêtre défroqué, depuis à l’asile. Aimé va découvrir la vie mouvementée de la Mondaine, à des lieues de sa vie personnelle.

Quel album ! Mais pourquoi donc ne l’ai-je pas lu plus tôt ? Je l’ai dévoré d’une traite, et maintenant j’attends impatiemment que la bibliothèque acquiert le second volume… Ce fut une joie de retrouver le duo gagnant de Lydie, avec un scénario toujours aux petits oignons, mêlant humour, délicatesse et bons mots, et un dessin magnifique, avec juste ce qu’il faut de réalisme mais aussi d’humour, servi par des couleurs très représentatives de l’époque. Le personnage d’Aimé est attachant, homme pur et innocent au milieu d’hommes qui sont parfois loin des enfants de chœur, même s’ils cachent eux aussi leurs secrets. Aimé est propulsé dans cet univers inconnu, dans lequel les petits arrangements pas toujours très catholiques et les blagues rarement de bon goût sont monnaie courante. Le scénario de Zidrou est, comme toujours, très bien construit : plein de rythme, alternant les personnages typiques, et avec des dialogues extras. Bref, j’ai adoré l’histoire et quant au dessin, Jordi Lafèbre parvient à tracer des portraits hauts en couleur. Son trait vif donne une sacrée ambiance à ce Paris coquin des années 1930. Cette alliance du scénario et du dessin donne un album incontournable pour qui aime la bonne BD…

Pour les adultes selon l@BD.

On en parle sur les blogs : Chroniques de l’invisible, La bibliothèque de Noukette, Positive rage, Un amour de BD, La ribambulle, Mille et une frasques

Premières planches à voir sur Izneo.

Une émission radiophonique en 4 épisodes sur l’histoire de la Mondaine est à écouter sur France Culture.

BD fait de société, BD hors de nos frontières

La tête en l’air

LA TÊTE EN L’AIR, par Paco Roca (Delcourt, 2013, coll. Mirages)

Emilio, un vieux monsieur atteint d’Alzheimer est placé en maison de retraite par son fils qui supporte de moins en moins la progression de la maladie. Au départ ne se rendant pas compte de la dégradation de son état, cet ancien directeur d’agence bancaire va découvrir le mode de vie particulier d’un établissement pour les personnes âgées. Chacun y a ses petites habitudes ou ses tics, chacun vit sa vie souvent seul loin de toute famille…

Voici une très jolie bande dessinée sur un monde qui fait un peu peur, celui des personnes âgées. Il faut dire que la situation est peu réjouissante pour Emilio, qui perd la tête au fil du temps, pour des choses de plus en plus simples, et au début sans s’en rendre compte. C’est un héros touchant, qui ne comprend pas au départ ce qu’il fait ici, car il irait très bien. Miguel son acolyte de chambre est quant à lui détestable : je n’ai pas aimé ce personnage qui rackette et vole les autres résidents à tout bout de champ, jusqu’à ce que la fin de l’album me fasse quelque peu changer d’avis sur cet homme au final tout seul au long de sa vie, et qui finira aussi tout seul, ignoré de tous. C’est vraiment un album touchant, qui sait alterner les passages graves (le moment où Emilio comprend qu’il a Alzheimer, la maladie qui progresse inéluctablement) avec d’autres bien plus légers (les activités « trépidantes » des résidents, la folle escapade nocturne d’Emilio, Simone et Miguel, les stratagèmes élaborés par Miguel pour qu’Emilio ne se fasse pas repérer comme défaillant et soit transféré à l’étage du dessus, avec tous les grabataires…). J’ai aussi beaucoup aimé les cases où le dessinateur représente ce qui se passe dans la tête des gens, qui souvent se croient encore dans le passé, comme par exemple la vieille dame qui pense passer ses après-midis dans l’Orient Express, alors qu’elle n’est qu’à la fenêtre de sa chambre. C’est vraiment très bien imagé, et chaque personnage a son univers propre, ce qui fait qu’on s’attache au moins à un de ces résidents, car on reconnaît l’un d’eux parmi des personnes de notre entourage. Cela est peut-être encore accentué par les deux pages à la fin de l’histoire dans lesquelles Paco Roca raconte les personnes réelles qui l’ont inspiré pour chacun des personnages. Cela donne un côté ultra réaliste, presque documentaire, très intéressant. Voilà donc un scénario très juste et crédible, servi par un dessin clair et agréable, avec des personnages relativement effilés : on n’a pas de souci à distinguer chacun des protagonistes. Enfin, l’auteur utilise de nombreuses couleurs pour restituer un monde au final humain, mais dont on sait qu’on n’en sort pas vivant… Pas très optimiste me direz-vous, mais l’auteur arrive tout de même à nous faire sourire, peut-être pour nous dire qu’il faut savoir profiter de chaque moment de la vie…

A partir de 15 ans selon l@BD.

On en parle sur les blogs : Le blog de Yv, Sin City, Le blog BD de Madmoizelle, Chroniques de l’invisible

C’est une lecture à ajouter au challenge de Kikine, car La tête en l’air est la réédition de Rides (sorti en 2007), album qui fait partie de la sélection des Ignorants de Davodeau.

Bande annonce du film, avec des passages qui, je crois, n’existent pas dans l’album :

BD hors de nos frontières, BD polar

Matilda Clarck

MATILDA CLARCK, par Artur Laperla (Paquet, 2006, coll. Blandice)

Matilda, hôtesse de l’air, est une jeune femme indépendante. Un jour, au pied de son appartement, un homme l’accoste : il s’agit du détective Harry Pincus, qui lui présente un portrait d’un homme qu’elle ne connaît pas. Cet homme est son père, ancien professionnel de l’escrime au cinéma, qu’elle n’a jamais connu. Il vient de mourir avec sa femme dans un tragique accident : un piano à queue est tombé sur leur voiture. Les assurances ont chargé Harry Pincus d’enquêter sur les circonstances de la mort, pour savoir à qui profiterait le crime. Matilda ne veut pas entendre parler de l’histoire de son père, mais Harry parvient à la convaincre car le testament de son défunt père la mentionne.  Il l’emmène donc rencontrer ses deux demi-frères, hommes quelques peu étranges qui pourraient avoir des choses à reprocher à leur père défunt…

J’ai choisi cet album pour sa couverture que je trouvais jolie. Je n’ai pas aimé cette lecture : l’héroïne m’est antipathique, elle ne sourit jamais et passe pas mal de temps à râler. Les autres personnages ne me sont pas parus plus agréables, que ce soit les deux frères ou le détective. J’ai eu du mal à trouver l’histoire intéressante, il y a des côtés absurdes qui se veulent sûrement drôles, mais cela ne m’a pas décroché ne serait-ce qu’un sourire lors de la lecture. La fin est complètement loufoque, réellement inattendue et totalement irréaliste. Le dessin est particulier, assez simple. Les personnages sont représentés en quelques traits, avec parfois quelques exagérations sûrement volontaires (les deux frères ont un menton énorme !), le trait est joli mais sans plus. Les couleurs sont assez ternes et correspondent à cette ambiance polar, mais c’est à peu près le seul point positif que j’ai trouvé à cet album… Dommage pour moi, j’ai sûrement manqué quelque chose…

A partir de 13 ans selon l@BD.

On en parle sur les blogs : Livres à lire, La bibliothèque du dolmen, Bulle d’air

BD historique, BD hors de nos frontières

Toute la poussière du chemin

TOUTE LA POUSSIÈRE DU CHEMIN, par Jaime Martin et Wander Antunes (Dupuis, 2010, coll. Aire libre)

1929, aux Etats-Unis. La crise économique frappe fort, de nombreuses personnes sont jetées sur les routes, de nombreuses banques ferment. Les faillites se succèdent, les déchéances aussi. Tom est un homme qui erre sur les routes du pays, à la recherche d’un travail. Seul, il fait la rencontre d’autres personnes dans la même situation que lui et fréquente la prison à cause de policiers un peu trop zélés. Suite à une rencontre avec un homme gravement malade, Tom accepte de partir à la recherche de son fils Buck, qui aurait comme projet de faire les voyages de Jack London. Au long de cette recherche, il va croiser une Amérique violente, où les policiers font leur propre loi et n’hésitent pas à tirer dans le dos, où des hommes voyagent clandestinement en train, où des noirs sont condamnés simplement à cause de leur couleur de peau… Bref, violence, racisme et injustice sont au rendez-vous de son périple…

Voici un récit fort, sur une période bien troublée. J’ai eu un peu de mal au départ à savoir où cela allait me mener, mais une fois les 80 pages lues, je ne regrette pas cette lecture. Le dessin de l’espagnol Jaime Martin est assez simple, tout en étant travaillé et réaliste. Le trait est est assez gras, les contours sont très marqués, mais le dessin colle bien à cette histoire qui mêle pauvreté, chômage, solitude… Les portraits sont particulièrement réussis, expressifs, avec des traits creusés ou des regards hébétés. Ils représentent bien l’état désespéré des protagonistes. Les couleurs sont particulièrement pâles, comme délavées. Le scénario du brésilien Wander Antunes est très noir, très pessimiste, mais il reflète bien la situation catastrophique des Etats-Unis d’après le krach boursier : chacun ne pense qu’à lui-même, sauf dans de rares cas où Tom est aidé alors qu’il est à bout de forces ou poursuivi par des crapules. La solidarité et l’entraide ne sont pas fréquentes, mais continuent tout de même à exister alors que les « homeless » sont de plus en plus nombreux (hommes, femmes et enfants confondus) et que la misère et la violence font désormais partie du quotidien. Le personnage de Tom est seul, on comprend qu’il a vécu lui aussi des choses difficiles, que sa femme n’est plus à cause de la crise, mais il comporte tout de même une bonne part d’humanité, ce qui en fait un héros au final assez sympathique. En effet, il ne peut refuser à un père de l’aider à retrouver son fils, et il ne cède pas non plus à la violence, sauf dans des cas extrêmes où il doit sauver sa peau, et on sent que sa « bonté » pourrait le perdre de nombreuses fois. Toute la poussière du chemin est un récit très noir, qui comporte tout de même des petites lueurs de positivisme. Une lecture intéressante, surtout grâce au héros.

A partir de 13 ans selon l@BD.

On en parle sur les blogs : Bulles et onomatopées, Un thé à la bibliothèque, Le grenier à livres de Choco, La bibliothèque de Noukette,

Les premières pages à voir sur Digibidi.