TOUTE LA POUSSIÈRE DU CHEMIN, par Jaime Martin et Wander Antunes (Dupuis, 2010, coll. Aire libre)
1929, aux Etats-Unis. La crise économique frappe fort, de nombreuses personnes sont jetées sur les routes, de nombreuses banques ferment. Les faillites se succèdent, les déchéances aussi. Tom est un homme qui erre sur les routes du pays, à la recherche d’un travail. Seul, il fait la rencontre d’autres personnes dans la même situation que lui et fréquente la prison à cause de policiers un peu trop zélés. Suite à une rencontre avec un homme gravement malade, Tom accepte de partir à la recherche de son fils Buck, qui aurait comme projet de faire les voyages de Jack London. Au long de cette recherche, il va croiser une Amérique violente, où les policiers font leur propre loi et n’hésitent pas à tirer dans le dos, où des hommes voyagent clandestinement en train, où des noirs sont condamnés simplement à cause de leur couleur de peau… Bref, violence, racisme et injustice sont au rendez-vous de son périple…
Voici un récit fort, sur une période bien troublée. J’ai eu un peu de mal au départ à savoir où cela allait me mener, mais une fois les 80 pages lues, je ne regrette pas cette lecture. Le dessin de l’espagnol Jaime Martin est assez simple, tout en étant travaillé et réaliste. Le trait est est assez gras, les contours sont très marqués, mais le dessin colle bien à cette histoire qui mêle pauvreté, chômage, solitude… Les portraits sont particulièrement réussis, expressifs, avec des traits creusés ou des regards hébétés. Ils représentent bien l’état désespéré des protagonistes. Les couleurs sont particulièrement pâles, comme délavées. Le scénario du brésilien Wander Antunes est très noir, très pessimiste, mais il reflète bien la situation catastrophique des Etats-Unis d’après le krach boursier : chacun ne pense qu’à lui-même, sauf dans de rares cas où Tom est aidé alors qu’il est à bout de forces ou poursuivi par des crapules. La solidarité et l’entraide ne sont pas fréquentes, mais continuent tout de même à exister alors que les « homeless » sont de plus en plus nombreux (hommes, femmes et enfants confondus) et que la misère et la violence font désormais partie du quotidien. Le personnage de Tom est seul, on comprend qu’il a vécu lui aussi des choses difficiles, que sa femme n’est plus à cause de la crise, mais il comporte tout de même une bonne part d’humanité, ce qui en fait un héros au final assez sympathique. En effet, il ne peut refuser à un père de l’aider à retrouver son fils, et il ne cède pas non plus à la violence, sauf dans des cas extrêmes où il doit sauver sa peau, et on sent que sa « bonté » pourrait le perdre de nombreuses fois. Toute la poussière du chemin est un récit très noir, qui comporte tout de même des petites lueurs de positivisme. Une lecture intéressante, surtout grâce au héros.
A partir de 13 ans selon l@BD.
On en parle sur les blogs : Bulles et onomatopées, Un thé à la bibliothèque, Le grenier à livres de Choco, La bibliothèque de Noukette,
Les premières pages à voir sur Digibidi.