CHARLY 9, par Richard Guérineau (Delcourt, 2013, coll. Mirages)

Récit romancé de la fin de vie du roi Charles IX, qui aurait ordonné le massacre de la saint Barthélémy en août 1572 à la demande de sa mère, alors qu’il n’avait rien à reprocher personnellement aux protestants. Dès lors, se rendant compte au fur et à mesure de l’étendue du massacre qui a eu lieu à Paris et dans la France entière, le jeune roi influençable sombre dans la folie. Sa mère prépare déjà sa succession avec son autre fils. Charles n’est pas spécialement attiré par la politique du royaume, il préfère la chasse et sa maîtresse protestante, épargnée du massacre à sa demande… Charles est un roi instable : par exemple, pour des convenances personnelles, il décide de changer le début du calendrier du 1er avril au 1er janvier. C’est un roi qui pour échapper à ses obligations, décide de s’enfuir en forêt. C’est donc un monarque loin d’être fiable, qui sombre dans la folie lentement et qui va être peu à peu abandonné de tous…
Voici un album adapté d’un roman de Jean Teulé. J’avais déjà lu Le magasin des suicides, mais là ce n’est pas le même genre, il y a une base historique réelle : les personnages principaux ont existé, le massacre de la Saint Barthélémy aussi. Après, pour le reste, je ne saurais dire précisément, mais je crois qu’il ne faut pas prendre pour argent comptant ce qui est raconté dans l’histoire. Une fois cela accepté, on peut lire ce récit comme une fiction et se mettre dans la peau du roi Charles IX, rebaptisé de façon anachronique Charly. On suit sa folie, que Richard Guérineau reproduit parfaitement avec les images de plus en plus rouge sang. J’ai particulièrement aimé les passages où on est dans la tête du jeune homme, avec l’épisode parodié de Johan et Pirlouit. J’ai trouvé ça très fort et complètement délirant. En feuilletant l’album en librairie, je trouvais ça bizarre, mais finalement quand on est dans l’histoire, cela passe presque pour être totalement normal, cela fait partie du délire du roi. La parodie de Lucky Luke est elle aussi bien trouvée, et prend toute sa place malgré l’anachronisme flagrant. L’histoire se lit d’une façon très fluide et sans difficultés. Au fur et à mesure que l’histoire avance, le rouge est de plus en plus présent avec le développement de la maladie du roi. L’album est constitué de plusieurs styles de dessin, qui ne dénotent pas du tout dans l’ensemble. J’ai beaucoup aimé les types de dessins, avec toujours de nouvelles choses, de nouveaux détails à observer. L’humour noir est aussi présent dans l’album, avec par exemple les répliques du roi qui se demande où se trouve certains membres de sa cour, alors que ceux-ci, protestants, ont été victimes du massacre. On se rend compte que le roi est complètement à côté de la plaque, et qu’il chasse même dans la cour du Louvre… Ce sont vraiment des passages drôles. Bref, le scénario est parfois complètement déjanté, et j’ai aimé cet aspect bien original. Avec un dessin très travaillé, cela nous donne un album incontournable parmi les sorties de 2013. C’est un album que j’ai emprunté en bibliothèque, mais je regretterais presque de ne pas l’avoir dans mes étagères…
A partir de 13 ans selon l@BD.
On en parle sur les blogs : Chroniques de l’invisible, Sin City, Le grenier à livres, C’est l’heure du goûter, Miss Alfie croqueuse de livres…
Réécouter l’émission de France Inter où est reçu Jean Teulé pour l’adaptation en BD.
Quelques planches à voir sur le site de l’éditeur.