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Primo Levi

PRIMO LEVI, par Matteo Mastragostino (scénario) et Alessandro Ranghiasci (Steinkis, 2017)

primo levi

Turin, milieu des années 1980 : quelques temps avant sa mort, Primo Levi, auteur du célèbre texte Si c’est un homme qui narre ses années en camp de concentration, rencontre une classe, mais cette fois, cela se passe dans l’école où lui-même a été élève. Depuis des années, il est habitué à témoigner auprès des plus jeunes de sa déportation et de sa vie à Auschwitz. Les questions et remarques plus ou moins pertinentes des élèves font ressurgir chez lui les souvenirs dans un ordre pas toujours chronologique… Tout commence à l’évocation de ses six chiffres tatoués sur son avant-bras…

Voici un album paru chez Steinkis en septembre dernier, qui m’a été conseillé par un représentant de livres. Je connaissais l’homme à travers son texte autobiographique « si c’est un homme », que j’ai lu quand j’étais ado et que je dois encore avoir quelque part dans mes étagères… Ici Primo Levi est revisité par un duo d’auteurs italiens, en y insérant une partie fictive, la rencontre avec les jeunes élèves. Ce n’est donc pas une adaptation pure de l’œuvre originale. Le scénariste explique d’ailleurs ce choix à la fin de l’album, car il ne se voyait pas reprendre tel quel le chef d’œuvre qu’est « si c’est un homme », donc il a choisi d’imaginer une rencontre fictive dans une école, et donc d’imaginer les dialogues des enfants.  Franchement ça se lit bien, même si ce n’est pas chronologique, les questions des enfants permettant de relancer sur des parties du livre (la résistance dans les montagnes des Alpes avant d’être capturé, l’arrivée au camp d’Auschwitz, l’amitié avec Alberto, l’aide apportée par Lorenzo, les chambres à gaz, les exécutions sommaires…). J’ai beaucoup aimé ce choix du scénario qui rend l’album lisible par des plus jeunes, et permet de varier de la simple adaptation.

Graphiquement parlant, le dessin est au départ un peu étrange, alors que la couverture (seule illustration en couleurs) ne le laissait pas forcément supposer. Le trait est très précis, montrant les corps décharnés des déportés, ne cachant rien de leur état psychologique non plus (les iris des yeux sont blancs, comme si la vie avait déjà disparu chez eux). On sent qu’il y a eu pas mal de recherches pour coller au plus près de ce qu’était la vie des déportés dans le camp. C’est vraiment un trait qui correspond tout à fait au propos. Le dessin se concentre vraiment sur les éléments principaux lors des scènes de 1987, car souvent il n’y a aucun décor dans ces scènes-là. Cela contraste avec les nombreux détails des cases se passant dans le camp de concentration polonais.

Le dossier complémentaire à la fin de l’histoire permet de mieux comprendre l’homme si on ne le connaît pas parfaitement, avec une chronologie assez développée, des biographies des autres personnages mentionnés, le témoignage du scénariste qui explique la relation entre lui et Primo Levi (intitulé « Primo et moi ») et même une biblio-vidéo-webographie qui permet d’en savoir plus si on le souhaite. Cela m’a vraiment permis de terminer correctement cet album, puisqu’on sait ce que devient Primo Levi après la guerre, qu’on a des compléments d’informations sur des événements évoqués dans les cases, et les raisons des choix scénaristiques… C’est vraiment un dossier très chouette, que j’ai apprécié ! Cet album n’a pas forcément eu beaucoup de visibilité (en tout cas, je ne l’avais pas vu à sa sortie, ni après sur les blogs), mais j’espère que vous serez tentés de vous le procurer, car c’est vraiment un bel hommage !

Je conseillerai à partir de 13-14 ans

On en parle (trop peu) sur les blogs : Cases d’histoire, Libre-R et associés

Premières planches à voir sur Izneo.

et album participe à la-bd-de-la-semaine-150x150, cette semaine chez Mo dans son bar à BD

32 réflexions au sujet de “Primo Levi”

  1. Etant donné l’émotion qui m’avait submergée lorsque j’avais lu ‘ »Si c’est un homme » pour la première fois (vers 15 ans, donc à peu près l’âge que tu recommandes), je ne peux que prendre note de ton conseil

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  2. J’ai lu « Si c’est un homme » et « La trève ». J’avais été profondément marquée. Je pense que je vais tenter de trouver cette BD. Merci de nous l’avoir présentée

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