BD engagée

Algues vertes, l’histoire interdite

ALGUES VERTES, L’HISTOIRE INTERDITE, par Inès Léraud (scénario) et Pierre Van Hove (dessin) (Delcourt / La revue dessinée, 2019)

006668423Enquête détaillée sur les algues vertes qui polluent les plages bretonnes depuis le milieu du XXe siècle et sont responsables de la mort d’animaux et d’humains. Mais les enjeux sont considérables pour la Bretagne, alors toute la vérité n’est pas dite sur ce phénomène lié à l’agriculture intensive qui s’est développée après la seconde guerre mondiale… L’impact environnemental ne pèse pas grand-chose face aux lobbies et aux entreprises qui pèsent lourd dans l’économie de la région…

La bande dessinée est vraiment un support qui permet d’explorer de nombreux genres : ici on est dans de la BD documentaire pure et dure, dans laquelle on suit l’enquête d’Inès Léraud, journaliste et documentariste, pour démontrer la dangerosité des algues vertes et surtout l’inaction des pouvoirs publics face à ce problème qui tue des animaux et des humains, depuis plus d’un demi-siècle. L’autrice donne des noms de personnes ou encore de structures publiques et privées qui ne font rien pour enrayer la prolifération de ce fléau. La justice ne semble pas non plus prendre la mesure de l’ampleur du phénomène, en n’enquêtant pas plus que cela lorsqu’un conducteur de camion qui transportait des algues vertes décède d’un infarctus dont on ne pense pas tout de suite qu’il est lié à ce qui était dans la remorque. Le silence est impressionnant dans cette région où la vie humaine et animale compte moins que l’économie et le tourisme, où l’avenir écologique de la région comptent moins que les engrais et les élevages de porcs qui s’étendent sans limite ou presque.

Après la lecture d’une telle enquête documentée et à charge, on ne regarde plus de la même façon les plages bretonnes, ni les entreprises bretonnes que les auteurs ne manquent pas d’égratigner plus ou moins durement dans ce récit. Ils ne ratent pas non plus des hommes politiques (cités dans les cases), tout comme les responsables d’organismes et autres associations. Les auteurs parviennent aussi à nous décrire l’odeur infâme du sulfure d’hydrogène qui se dégage des algues en état de décomposition, et ça je crois que ce n’est pas commun qu’une BD parvienne à nous faire imaginer une odeur aussi infecte…

Le récit, quant à lui, se lit bien : il est fluide, le texte n’étant pas trop présent. Souvent en voix off, le récit n’écrase en tout cas pas le dessin, assez simple mais très expressif et clair pour faciliter la lecture. Il montre simplement les faits, comme un documentaire vidéo l’aurait fait. Le propos est clairement offensif, dénonçant l’inaction des pouvoirs publics depuis des années, mais le trait a tendance à adoucir un peu le propos.

Le tout se lit très bien, et peut contribuer à changer les mentalités : après ma lecture, je me suis (re)dit « vive le local et la vente directe », face aux grandes entreprises et aux coopératives (qui ont quelque peu oublié leur raison d’être) qui sont désignées comme une des causes de cette pollution verte bretonne. Algues vertes est pour moi un ouvrage qui est à ne pas rater ! En tout cas, en ce qui me concerne, je serai plus attentive à ce sujet des algues vertes quand j’en entendrai parler…

Non mentionné sur l@BD, mais je dirais pas avant 15 ans.

Quelques planches à voir sur le site de l’éditeur.

Cet album a reçu le prix 2020 de la BD bretonne.

On en parle sur les blogs : Ca sent le book, Les fanas de livres, Chez Canel

Cet album participe à labd bleu, et aujourd’hui mercredi, c’est Stephie qui regroupe les liens des participants !

14 réflexions au sujet de “Algues vertes, l’histoire interdite”

  1. Noté depuis longtemps. Je suis déjà très « consommer local » et « réduction maximale des déchets » alors je n’aurai pas de mal à être convaincue.

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  2. J’ai beaucoup aimé ! enfin ça m’a bien mise en pétard aussi, forcément, mais comme tu le dis, le sujet est fouillé et cette BD vraiment édifiante. A lire et à faire tourner, c’est certain ! 🙂

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